Une pièce de Marivaux - a play in French with English subtitles.
Résumé
Comédie aux dialogues étincelants, c’est la pièce de Marivaux la plus célèbre et la plus jouée.
N’a-t-on jamais rêvé d’être une petite souris et se glisser près de quelqu’un pour le connaître vraiment ?
Effrayée à l’idée d’épouser un homme sans le connaître, Silvia décide de prendre la place de sa suivante Lisette, qui, elle-même aura la tâche de se faire passer pour sa maîtresse. Elle pourra ainsi mieux observer son prétendant. Mais Dorante et son valet Arlequin, de leur coté, ont eu la même idée.
« Je voudrais bien pouvoir baiser ces petits mots-là, et les cueillir sur votre bouche avec la mienne’’?»
A s’appliquer à imiter, les personnages offrent une savoureuse parodie garnie d’effets comiques. De surprises de l’amour en quiproquos, de complications en situations hilarantes, cela ne pourrait être qu’une fine farce. Mais là où la hiérarchie sociale est déstabilisée, la comédie à l’italienne et ses acrobaties laisse place à la confusion et la malice. Le hasard ouvre le jeu à l’amour. Et l’amour se laisse aller là où on ne l’attendait pas.
La pièce
Dans cette pièce créée en 1730 Marivaux met les cœurs à l’épreuve par le jeu du double travestissement et la mise en scène d’acteurs spectateurs.
Sous l’apparente légèreté des personnages quelquefois cocasses et le raffinement de la langue tantôt galante tantôt rustique pointe une inquiétude profonde des caractères et une critique subtile des inégalités sociales. Oserait-on transgresser les préjugés de sa caste ? Certains s’étonnent d’être sensibles aux charmes d’une personne d’un rang inférieur, d’autres s’en émerveillent et profitent de leur pouvoir de séduction. Ils découvrent qu’ils peuvent aimer ailleurs que dans le milieu dont ils sont issus.
« Que le sort est bizarre! aucun de ces deux hommes n’est à sa place » (I, 7).
Les personnages deviennent lucides sur eux-mêmes et les injustices qui les entourent. L’ordre social est un instant menacé par une vérité révolutionnaire : « le mérite vaut bien la naissance. » (III, 8) Mais personne n’imagine qu’il pourrait changer. Pour tous, le travestissement aura été une épreuve où l’on aura appris à dépasser ses préjugés et ne pas bercer d’illusions.
« Souvenez-vous qu’on n’est pas les maîtres de son sort » (II, 5).
La mise en scène
On ne se soucie pas du réalisme et de la vraisemblance du travestissement tant le choix de l’auteur paraît évident lorsqu’on voit Arlequin jouer si mal le rôle du maître et Silvia qui ne s’en rend même pas compte. Aux grossièretés du valet/maître succèdent de belles phrases. Nul besoin de préciser un décor, le cadre familial suffit à l’intrigue. Rien ne motive les entrées et les sorties des personnages. Ils apparaissent au moment nécessaire. On ne se soucie pas plus de ce qu’ils font en coulisse. Seule importe l’intrigue endiablée sur scène.
Le spectateur est prévenu dès le départ de la supercherie. Il convient alors d’éliminer toute chose non nécessaire à l’histoire et laisser le plaisir de la distance théâtrale avec ses conventions opérer sur lui. « Il voit des êtres charmants auxquels il s'intéresse d'emblée, une situation piquante dont il attend le dénouement, et dont le déroulement est savamment ménagé de scène en scène, un piège qui se referme sur quatre jeunes gens à leur satisfaction finale, sous l'œil amusé de deux meneurs de jeu. » (André Durand, Comptoir littéraire).